Les facteurs humains (FH) jouent un rôle crucial dans la qualité et la sécurité des soins. Ils englobent tout ce qui relève de l’interaction humaine, de la communication, de la prise de décision, et de la gestion du stress. En effet, une mauvaise gestion des facteurs humains peut mener à des erreurs, parfois graves, qui peuvent affecter la santé des patients. L’anecdote suivante illustre l’importance d’une communication claire et précise dans le milieu médical.
Anecdote par Jérémie Garnier, anesthésiste
Lors de ma formation en anesthésie, j’ai été témoin d’une situation qui m’a marqué.
Un jeune homme de 17 ans est arrivé en salle d’opération pour une intervention chirurgicale. L’anesthésiste de garde avait prévu un protocole d’anesthésie générale comprenant un hypnotique et un morphinique.
Cependant, au moment de sécuriser les voies aériennes, le patient a commencé à désaturer rapidement. Dans l’urgence, l’anesthésiste a donné l’ordre de « donner le curare, vite ! »
Immédiatemen, pris le plateau de médicaments, préparé la célocurine, et injecté la dose requise, annonçant ensuite que c’était fait.
À ma grande surprise, l’anesthésiste s’est étonné de mon choix de médicament, disant qu’il aurait fallu donner du nimbex, car la situation n’était pas une urgence vitale.
Analyse de l’anecdote vécue
Cette situation met en lumière plusieurs facteurs humains. Tout d’abord, la communication entre l’anesthésiste et moi-même était insuffisante. Aussi, l’anesthésiste aurait dû préciser quel curare il souhaitait que j’administre. Ensuite, la prise de décision sous pression a joué un rôle. Enfin, La désaturation rapide du patient m’a poussé à agir vite, optant pour la célocurine sans prendre le temps de clarifier l’ordre donné.
Comment l’incident aurait pu être évité
Une communication claire et précise aurait pu prévenir cette erreur. L’anesthésiste aurait dû spécifier le médicament à administrer et s’assurer que j’avais bien compris l’ordre. De plus, la mise en place d’une double vérification pour les médicaments, surtout ceux qui peuvent avoir des conséquences graves, aurait pu être bénéfique.
Outils pour prévenir ce genre d’incident
Pour prévenir ce type d’erreur, plusieurs outils peuvent être mis en place :
- Protocoles de communication : Le SBAR (Situation, Background, Assessment, Recommendation) est un exemple de protocole utilisé dans de nombreux hôpitaux pour améliorer la communication entre les professionnels de santé. Celui-ci peut parfaitement être adapté à l’urgence
- Formation continue : Des formations sur les compétences non techniques, telles que la communication, le travail d’équipe, et la prise de décision, peuvent être mises en place pour aider les professionnels de santé à mieux gérer les facteurs humains. Effectivement, elles permettent d’apprécier, en s’intéressant aux neurosciences, que l’interprétation de chacun autour des mots, peut nous jouer des tours
- Systèmes de vérification des médicaments : La mise en place de systèmes de vérification des médicaments, y compris une double vérification par deux professionnels de santé différents, peut aider à réduire les erreurs médicamenteuses.
Cette anecdote souligne l’importance des facteurs humains dans la sécurité du patient. Une communication claire et précise, ainsi que des systèmes de vérification des médicaments, sont essentiels pour éviter les erreurs médicamenteuses et garantir la qualité des soins. Ainsi, les professionnels de santé doivent être formés aux compétences non techniques et être conscients de l’impact que leur communication et leur prise de décision peuvent avoir sur la santé des patients.
Nous vous conseillons sur le sujet, le livre de Jérôme Cros « Mieux communiquer entre soignants », et également l’ouvrage Facteurs Humains en Santé, coordonné par lex excellents Régis Fuzier et François Jaulin.
Consultez le site Facteurs Humains en Santé où vous trouverez de nombreuses ressources sur le sujet.